L’Art déco s’inscrit dans la continuité de l’Art nouveau. Pour autant, il s’en écarte considérablement du point de vue stylistique. Focus sur un courant majeur de l’histoire du mobilier avec notre Magazine Design.

L’Art déco caractérise pour l’ensemble des arts appliqués à partir de 1910, un style novateur aux lignes strictes et épurées. Après l’exubérance des lignes courbes de l’Art nouveau, les créateurs ont éprouvé le besoin d’un retour à des projets plus sages. Mais si la sobriété des lignes est de mise, l’ornementation est toujours bien présente et les meubles Art déco ne sont pas aseptisés.

Ce courant a perduré jusqu’à la fin des années 1930 et a connu son plus grand triomphe lors de l’Exposition Internationale de Paris en 1925.

La première source dans laquelle l’Art déco puise son inspiration est le monde de l’art, alors en pleine ébullition. Au début du XXème siècle, l’art s’émancipe et une rupture très nette avec les arts du passé se dessine. Le cubisme, encore peu accepté, est de plus en plus présent et bien connu des milieux artistiques et l’Art déco va s’en imprégner. L’Art déco va également s’imprégner d’autres courants artistiques avant-gardiste du début du XXème siècle comme le futurisme italien ou le constructivisme russe.

Usage de matériaux nobles : galuchat, loupe d’amboine, nacre, ivoire. Détail bureau David-Weill, Ruhlmann 1918. Sophistication et précision sont de mise. Détail bureau David-Weill, Ruhlmann 1918.

Le mouvement trouve aussi son inspiration dans des cultures étrangères telles que l’art nègre, l’art oriental, l’égyptologie ou bien encore la haute couture et les ballets russes qui connaissent un succès mondial à l’orée du XXème siècle.

Enfin l’Art déco s’inspirera du monde qui l’entoure, un monde en plein essor industriel. Cette nouvelle ère laissera sa trace dans l’esthétique de certaines pièces produites industriellement. 

Ce panache d’influence donnera naissance à un style riche et varié.

Toutefois, les différentes créations Art déco ont toutes en commun l’emploi de matériaux nobles et la grande qualité de production des pièces. 

Jusque dans les années 1920, l’Art déco était surtout réservé à une clientèle de privilégiés capable de mettre le prix fort pour avoir des pièces uniques, rendant ainsi possible l’utilisation de matières rares et onéreuses ainsi que des procédés de fabrication manuels extrêmement précis. Les essences de bois précieux vont avoir la côte : ébène de Macassar, palissandre, citronnier, acajou de Cuba par exemple. La marqueterie et les placages seront très appréciés avec des matières comme l’ivoire, la nacre, les peaux de serpents, le crin de cheval, l’écaille de tortue, le galuchat (peau de raie). La laque enfin, technique très complexe de vernis, sera utilisée par bon nombre de créateurs. Tous les créateurs de la mouvance produiront des meubles extrêmement raffinés tant par leur style que par leur rendu. La sophistication et la précision sont deux composantes essentielles de ce mouvement.

Lors de l’exposition internationale de 1925 à Paris, le public se rendra pleinement compte de cette méticulosité et de cette richesse en découvrant les pavillons des plus fameux créateurs Art déco du début du siècle : Jacques-Émile Ruhlmann, reconnu pour son travail extrêmement raffiné ou bien encore Louis Süe et André Mare reconnus pour leur meubles faisant référence à des styles anciens comme le Louis XV ou le Louis XVI. Il  ne faut pas non plus oublier Paul Poiret, Jules Leleu et Jean-Michel Frank. 

Lampe Jean Perzel. Géométrisation, pied en ébène de Macassar, verre blanc dépoli.

A partir de 1920, l’esthétique « Art déco » évolue. Des créateurs n’hésitent plus à user de matériaux plus industriels et à expérimenter les possibilités offertes par l’industrie pour produire des pièces en série. Pour ces « modernistes » qui sont Jean Adnet, Jean Lurçat, Pierre Chareau, l’utilisation du métal et la reproduction en série étaient de rigueur. Il convenait de s’adapter à l’ère nouvelle et l’essor industriel devait supplanter l’artisanat et la pièce unique.

Dans l’univers du luminaire, l’exubérance et les panaches colorés des lampes Tiffany ou Art Nouveau,  ont vite été supplantés par des lampes aux lignes strictes, aux piètements métalliques et aux abat-jours en verre translucide. Aux jeux de lumière chaude et colorée, on préférait à présent les jeux de transparence et de brillance rendus possible grâce à l’utilisation de l’aluminium, du nickel, de l’acier combiné à des verres simplement dépoli ou transparent. 

La géométrisation allait de pair avec l’utilisation des nouveaux matériaux et des nouveaux moyens de production. Dès les années 1920, les pièces produites étaient de plus en plus stylisées, faites d’angles droits et saillants et l’ornementation tendait à disparaître. Les matériaux modernes prenaient le pas sur les matériaux nobles. Le métal allait progressivement supplanter l’ébène de Macassar.  Dès 1925, c’est le déclin de l’Art déco au sens le plus « traditionaliste ». Une  nouvelle mouvance pointe le bout de son nez : le Modernisme, qui achèvera définitivement l’Art déco vers 1939.